Dans un courrier daté du 1er mars, le président Marius Vizer a exigé que la Fédération iranienne de judo s’engage à mettre un terme à toute forme de discrimination politique et donne l’assurance de ne plus interdire à ses athlètes de combattre ou de partager le podium avec des athlètes israéliens.
Une réponse adressée le 8 mai est publiée sur le site de la FIJ. Elle est signée par le président du Comité olympique iranien et par Arash Miresmaeili, le président récemment élu de la Fédération iranienne de judo dont on sait qu’il a à la fois souffert et bénéficié de circonstances similaires.
Les auteurs s’engagent formellement à respecter la Charte olympique et les statuts de la FIJ.
Ce courrier apparaît comme une avancée notoire et chacun doit se féliciter de l’initiative et de la détermination du président de la FIJ.
On ne peut, cependant, ignorer que la volonté affichée des responsables iraniens ne fait que confirmer des accords bien antérieurs. En effet, la Fédération iranienne a de facto accepté de respecter sans réserve les statuts de la fédération internationale de judo dès son adhésion… à la fin des années 1970. Il en est de même en ce qui concerne le comité olympique iranien reconnu… en date du 1er janvier 1947.
Notons également que jusqu’à présent aucun judoka iranien n’a explicitement transgressé le principe de non-discrimination. Les raisons évoquées ont toujours été officiellement justifiées par des avis médicaux expliquant soit un surpoids (Miresmaeili à Athènes), soit une impossibilité de combattre ou de se présenter sur le podium (Mollaei à Paris), pour ne citer que ces deux cas. Les déclarations des hommes politiques, celles prêtées aux athlètes par les organes de presse bien que largement médiatisées auprès de la population ont toutes reçu un démenti également officiel mais principalement à destination des seules instances sportives.
Les auteurs du texte affirment que le judo iranien est en phase de croissance, que selon eux l’atteinte des objectifs et de l’idéal de la FIJ nécessite un effort de compréhension mutuelle ainsi que de la patience (sic).
D’une manière qui se veut rassurante, ils poursuivent en indiquant que le Comité olympique, le ministère des sports et la fédération iranienne de judo ne ménagent aucun effort dans leur négociation avec le Parlement pour trouver une solution légale adaptée à la situation.
Prenons donc acte de cette belle déclaration d’intention qui pourrait faire date dans l’histoire du sport international.
Mais souvenons-nous du cas récent de ces deux joueurs de football iraniens, Haji Safi and Masoud Shojaei, interdits de sélection nationale pour avoir joué en Ligue Europa avec leur club grec du Panionios contre le Maccabi Tel-Aviv en juillet 2017. Le ministre iranien adjoint des Sports n’avait-il pas alors déclaré à la télévision d’état: « Ils n’ont plus leur place en équipe nationale d’Iran car ils ont franchi la ligne rouge du pays ». Pour le vice-président de la Fédération iranienne de football, ces joueurs auraient dû refuser de participer « même au prix de l’annulation de leur contrat ». Leur réintégration n’a été possible que grâce à la pression des supporters et à l’intervention de la FIFA, le gouvernement iranien n’hésitant pas alors à nier avoir pris toute forme de sanction à l’encontre des deux joueurs.
Tout ceci nous conduit à une interrogation. A l’heure où les accords sur le nucléaire iranien sont menacés, quel crédit accorder à un engagement en demi-teinte dans un secteur qui n’a rien de stratégique? Les articles enthousiastes de Mark Pickering et d’Alan Abrahamson, journalistes de la FIJ, sont-ils annonciateurs d’un profond changement de politique ou ne traduisent-ils qu’une vison angélique de la situation ? Seul l’avenir nous permettra d’apprécier la portée réelle du courrier adressé à la FIJ.